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Histoire

Des périodes de la préhistoire et de l’antiquité, quelques traces d’occupation humaine ont été relevées sur le territoire de la commune. Cependant l’histoire de Saint-Claude débute véritablement au Ve siècle, autour des années 430-435, avec l’arrivée d’un ermite, Romain, bientôt suivi de son frère, Lupicin. En quête d’un « désert », ils s’établissent dans ce « rude territoire vierge ». Ce lieu, un éperon entouré de montagnes au confluent des rivières de la Bienne et du Tacon, s’appelait Condadisco, du celte condat, confluent. Ils construisent des huttes et se préparent à vivre une existence de cénobites, c’est le début du monastère de Condat.

La renommée des ermites attire des disciples de plus en plus nombreux. Dès lors, l’ermitage originel se transforme peu à peu en un monastère organisé où règne désormais la vie communautaire. C’est sous l’abbatiat de Saint-Oyend (de 485-490 à 512-514) que se régularise véritablement la vie communautaire. La destruction par un incendie des constructions primitives permet une restructuration du monastère parfaitement adaptée à une vie communautaire avec l’introduction de la règle de Tarnate. Oyend, 4ème abbé, meurt en 510. Les guérisons opérées de son vivant se perpétuent après sa disparition et sa popularité devient telle qu’il donne, pour dix siècles, son nom à l’abbaye et à la ville : Saint-Oyend de Joux.

La croissance, du début du XIe siècle à la moitié du XIIe siècle puis les crises
Aucune donnée archéologique ne permet actuellement de préciser une chronologie et une localisation, même relative, des origines de la ville. Il faut attendre la première moitié du XIe siècle pour disposer des premières indications d’une église paroissiale à Saint-Oyend de Joux.
Survivante des crises du Xe siècle qui a vu disparaître bon nombre de monastères, l’abbaye est en pleine période de croissance du XIe siècle à la première moitié du XIIe siècle. Cette vitalité se traduit par une période d’importantes reconstructions au sein du monastère.
La seconde moitié du XIIe siècle et le XIIIe siècle marquent le début du temps des crises. Les raisons en sont multiples. En premier lieu les ordres nouveaux cernent Saint-Claude et lui font une nette concurrence. En second lieu des querelles créent des divisions internes dans l’abbaye. Le XIIIe siècle connaît d’autres difficultés dues cette fois à la pression des seigneurs laïcs.

La crise spirituelle et les miracles
Le bas Moyen-Age est marqué par une série de crises qui affectent l’abbaye et la ville ; d’importants changements politiques et juridiques surviennent. Les difficultés sociales, économiques et juridiques se multiplient et l’abbaye connaît une grave crise spirituelle. L’idéal de pauvreté qui régnait à l’intérieur du monastère s’atténue, la vie commune et les observances régulières sont de moins en moins respectées. Cependant, dans la continuité des XIIe et XIIIe siècles, les miracles autour des reliques de saint Claude se poursuivent et le nombre de pèlerins augmente. Progressivement la ville est appelée Saint-Claude par le peuple.

Le culte de saint Claude
Selon la tradition, Saint Claude serait né à Salins, à la fin du VIe siècle. Sacré évêque de Besançon, il y aurait brillé « d’un éclat incomparable ». Après sept années d’épiscopat, il se serait retiré « dans les solitudes du Jura ». Plus vraisemblablement, Claude, 12ème abbé de Saint-Oyend de Joux, administra l’abbaye durant 55 ans, du milieu du VIe siècle au début du VIIe. Mais ce n’est guère qu’à partir du XIIe siècle que la réputation du thaumaturge, ou faiseur de miracles, se répandit, après que l’on eût retrouvé, vers 1160, son corps entier et non corrompu, bien que non embaumé.
Sa gloire éclipsa celle de saint Oyend et attira sur son tombeau une foule de pèlerins, au point de donner, lui aussi, son nom à la ville vers le XVIe siècle. Ses reliques furent brûlées en 1794 par les révolutionnaires.

La terre de Saint-Claude à l’époque moderne
L’histoire de la terre de Saint-Claude à l’époque moderne se confond de plus en plus avec l’évolution générale de la région, les ducs de Bourgogne s’étant déjà de plus en plus immiscés dans la gestion politique de l’abbaye. Le XVIe siècle est considéré comme le siècle d’or de la province par l’essor du commerce et de l’industrie. Cependant l’économie sanclaudienne dépend pour une bonne part des pèlerinages, et si les reliques du saint attirent toujours les foules, leur flux va décroissant. L’artisanat de la tournerie a dû très tôt se diversifier et se tourne vers la fabrication d’objets profanes. Le protestantisme et la baisse de dévotion amenuisent les revenus de la ville.
La Ville de Saint-Claude est marquée au XVIIe siècle par l’invasion des troupes françaises en 1639 puis en 1668. En 1674, toute la Comté est vaincue et la terre de Saint-Claude conclut elle-même une capitulation séparée avec la France. L’abbaye est marquée par la décadence, cette fois-ci irréversible. Ce processus aboutit à la sécularisation et la création du diocèse de Saint-Claude en 1742.
La ville est ravagée par un grand incendie en 1799. Des esprits religieux voient aussitôt, dans cet incendie, le doigt de Dieu : la Ville qui avait laissé les révolutionnaires brûler le corps de son saint patron en 1794 ne devait-elle pas brûler à son tour ? Et l’on montrait, comme signe manifeste, la maison du menuisier Jacquet, aux Carmes – celui là même qui avait recueilli les reliques du saint- épargnée par le feu quoique proche du centre ville.

A nouveau la ville subit d’énormes dégâts provoqués par le passage d’un cyclone en 1890. L’ouragan dévaste la ville à 19h40, ce 19 août 1890, en 40 secondes seulement. La gare est rasée, le pont suspendu est retourné, les clochetons de la cathédrale sont abattus et de nombreuses maisons sont en ruines…

Hauts Jurassiens, derniers serfs de France, ou la bataille de la main morte
La mainmorte était une servitude qui, en vertu d’anciens droits féodaux, privait le paysan mainmortable de la faculté de disposer de ses biens par testament quand il n’avait pas d’héritier direct (enfants, frères ou neveux) vivant en communion avec lui. Instituée pour maintenir une main d’œuvre nombreuse sur les terres de l’abbaye, elle contraignait les familles à une cohabitation perpétuelle. De plus, le mainmortable ne pouvait pas devenir bourgeois s’il s’établissait dans une ville. Enfin, tout homme libre, fût-il bourgeois, séjournant plus d’un an et un jour sur une terre mainmortable sans autorisation expresse encourait la condition de mainmorte personnelle.
C’est donc la quasi-totalité des habitants de la Terre de Saint-Claude, à l’exception de quelques territoires francs qui était mainmortable. L’abbaye légitimait la mainmorte par le droit dit « du premier occupant ».
On pouvait sortir de l’état de mainmorte par l’affranchissement accordé par l’abbé ou par le désaveu prononcé par le mainmortable lui-même, qui devait, dans ce cas, abandonner à l’abbé tous ses biens immeubles et les 2/3 de ses biens meubles, jusqu’à la valeur de ses propres vêtements.
Au siècle des Lumières, cette servitude parut anachronique et insupportable. Les habitants intentèrent un procès au chapitre cathédral, héritier de l’abbaye, avec Christin comme avocat, encouragé par Voltaire. La mainmorte ne sera abolie que le 4 août 1789 avec tous les autres droits féodaux.

Sources : Saint-Claude à travers les Ages. Les Amis du Vieux Saint-Claude
Archives municipales
Sébastien Bully, archéologue